Léa s'en va...

En ce début du mois d’avril, Julie nous annonça qu’elle était enceinte. J’ai pleuré, non pas de joie mais de chagrin, pour moi ce n’était pas le moment. Ma première réaction était de ne rien dire à Léa mais Patrick n’était pas d’accord, Léa avait le droit de le savoir. Comment pouvais-je me réjouir de devenir grand-mère alors que ma fille se mourait. Trop dur, trop difficile à accepter… Et puis, cette vieille croyance ; à chaque décès, une naissance…résonnait dans ma tête.

Léa souffrait de plus en plus, des radios ont été faites et montraient un tassement de certaines vertèbres, cette fichue cortisone était entrain de ronger toutes ses articulations.

La morphine (MS Direct) ne suffisait pas à réduire les douleurs, nous sommes donc passé à la pompe à morphine ; un petit boitier du style d’un walk-man, avec une cassette de morphine qui déversait de manière régulière des gouttes de morphine via le porth-a-cath de Léa. Un bouton lui permettait d’injecter une dose supplémentaire quand c’était nécessaire. Et ce l’était régulièrement.

Nous n’allions plus à l’hôpital, pour quoi y faire ? Rien que le trajet (50km) était une souffrance supplémentaire. Pourtant, Léa voyait bien qu’elle avait besoin de plaquettes, les pétéchies apparaissaient partout sur son corps.

Le lundi 26 avril, notre fille, dans un ultime effort voulut aller dans un grand magasin de jouets, se choisir de nouveaux puzzles. Les puzzles étaient un de ses passe-temps favoris depuis de nombreuses années, mais uniquement des dessins pas de paysages, et ce n’est pas évident à trouver à 2 ou 3000 pièces. Alors, elle avait une grande collection des puzzles de Jan Van Haasteren, puzzles humoristiques qui représentent, chacun, une scène avec une quantité incroyable de personnages dans toutes les positions possibles(dans un aéroport, au zoo, à la plage, sur un terrain de foot etc…).

Nous en avons trouvé quelques nouveaux, ce jour là, ils sont restés emballés, jamais elle ne les fît.

Elle a acheté plusieurs posters de chiens pour re décorer sa chambre.

Il faisait très beau ce jour-là et nous avons mangé un sandwich à la terrasse d’un snack.

Cette sortie lui avait demandé un effort surhumain.

Le lendemain, Léa était très très fatiguée…

Le soir, Julie est venue lui dire bonjour et nos trois filles ont posé les posters achetés, la veille. Léa leur disait où les coller et nous les entendions rire à elles trois. Notre amie, infirmière, tata F. pour Léa, est passée, également ce soir là. Léa nous a demandé de la glace à la pistache, elle arrivait péniblement à mettre la cuillère dans la bouche mais refusait totalement mon aide.

Plus jamais, de la glace à la pistache n’entrera dans la maison, rien que la vue, m’en donne la nausée.

Je dormais, déjà depuis plusieurs semaines, dans la chambre de Léa à côté d’elle pour l’aider à se lever de son lit. Cela nous rassurait car notre chambre est au rez de chaussée.

Le mercredi matin, alors que je m’étais levée plus tôt, Léa s’était péniblement levée et descendue seule. Elle ouvrit la porte et me dit le visage décomposé par la douleur ; « Maman, je ne me sens pas bien « J’avais compris qu’on arrivait au bout… Je l’installais dans un fauteuil et nous sommes restés à ses côtés toute la journée.

Nous avons eu encore quelques visites…

Nous avions demandé à S., infirmière de liaison, de rester la nuit car nous sentions la fin s’approcher.

Léa a commencé à râler….

Je n’écrirai pas les dernières heures, elles nous sont propres.

Nous avons fait du mieux que nous pouvions….

Léa, notre amour de petite fille a cessé de respirer à 1h10’ du matin, ce jeudi 29 avril 2004…

Son calvaire était terminé.

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